Looping canadien pour la Patrouille Suisse

« Alors ta boucle au Canada ça me tente »

« Yep cool ! »

« Mais on va par Bella Coola et pas par Prince Rupert… »

« D’acc, moi mon but c’est les parcs de Jasper et Banff »

Voilà en gros ce qu’il s’est déroulé lors de ma rencontre avec Chris. Quatre phrases et bien d’avantage de bières et on se décide à rouler ensemble en Colombie Britannique pour un tour d’environ 3000 km.

Et puis un jour je me suis réveillé avec l’idée de confectionner des barres de céréales. Le succès fut au rendez vous avec une vingtaine de bonnes barres maison.

« Ca c’est cool, on en refait pour notre départ ? » me dit Chris.

Prenez une cuisine, deux hommes venant de découvrir une recette trop cool et qui sont affectés du syndrome « hé, on en fait encore ? », et vous vous retrouvez avec pas moins de 14 kg de ladite recette. Impossible de tout faire rentrer dans nos sacoches, on embarque 5 kg chacun.

Il est temps de laisser Vancouver derrière nous, un au-revoir pour Chris qui bouclera la boucle, un adieu pour moi qui continuerai vers les USA.

Nous enfourchons nos bécanes sous les larmes de départ du ciel de Vancouver et pédalons pour quelques jours sur la Sunshine Coast, qui n’a pour le coup rien de sunshine et cela dit pas grand chose de coast non plus, la majorité de la route ne longeant pas du tout la côte. On file vers Port Hardy tout au nord de l’Île de Vancouver et embarquons sur un grand ferry luxueux nous emmenant à Bella Bella, puis un second ferry nous dépose au village paumé de Bella Coola. Pendant le trajet, des dauphins nagent à côté du bateau et on croit observer une baleine.

Nos habitudes personnelles sont très ancrées dans notre routine respective qui s’est développée par les nombreux mois de voyage solitaire. Il s’avère plus dur qu’on le croit de changer ses critères d’un endroit de camping sauvage ou d’allonger le temps d’une pause repas. Quelques fois nos deux forts caractères font monter la tension sur des petits détails mais jour après jour chacun trouve ses repères.

Un soir, le fessier ajusté à lunette, je lâche du leste quand Chris me crie:

« Hé Max putain y’a deux grizzlis qui s’ramènent »

(Ndlr: Suite à de nombreuses plaintes de parents des lecteurs du blog, la description des dix secondes qui ont suivi a été censurée.)

« Oh les grizzlis, les gars ! Là c’est chez nous, restez par là bas, on veut pas d’embrouille et vous non plus ! » que Chris leur crie.

Les deux bêtes lèvent la tête, comprennent que les Romands de la Patrouille Suisse, ça rigole pas, et font demi tour. Tuschur rigol ? (et schàmé travaï) ? Tchô bonne les grizzlis ouais ! Moi qui voulais voir des ours, je suis bien content. Cela dit s’ils avaient pu éviter de se pointer en soirée à quelques pas d’notre campement, j’aurais mieux dormi durant la nuit. On attaque le lendemain la montée qu’absolument tous les locaux nous affirment comme quasiment infaisable à vélo, sur une piste défoncée. Cette colline a même un nom frisant l’originalité: « The Hill ». Au final on se retrouve à grimper sur une piste en bon état avec certes quelques déclivités brutales de l’ordre de 16-17% mais rien d’insurmontable pour deux machines du pédalier comme nous. On atteint le sommet à midi et Chris se permet même une sieste.

Après de nombreux jours à filtrer notre eau et à rationner l’avoine, on accueille en ouvrant les bras la grande zone industrielle qu’est Williams Lake. Un méga burger (qui deviendra par la suite notre rendez-vous hebdomadaire) et un ptit coup de WiFi nous fait un grand bien ! Quelques jours après nous y voilà enfin ! Les joyaux du Canada, les parcs de Jasper et Banff. Bon c’est beau, splendide, magnifique, éblouissant…la description des paysages c’est pas vraiment mon truc.

Dans les parcs, on tombe coup sur coup sur deux autres suisses roulant en solitaire, Phil et Reto. On partage la route pour en temps, jouons une partie de chibre (et non plus une virtuelle pomme à deux) avec deux bouteilles de vin que Chris a réussi à dégoter de derrière les fagots (plus de détails sur son article). Voilà, il est temps de se quitter avec mon compatriote helvétique. Je ne boucle donc pas le looping, je me rends directement à Portland pour une autre rencontre que j’attends depuis longtemps. Chris retourne à Vancouver et Reto et moi continuons ensemble pour quelques jours en direction des Etat-Unis. Dur dur de me séparer avec Chris après ces quelques semaines ultra intenses.